Michaux
veillait la nuit près du hameau en gardant son magot... |
Libé,
le 13 novembre 2002 titrait sur l’échauffement social en Guadeloupe.
Dans son article, le journaliste disait en substance que la sénatrice
de Guadeloupe et présidente de région, Lucette Michaux-Chevry,
malgré une batterie de casseroles presque digne de Xavière
Tibéri, « restait très fréquentable ».
Belle illustration de la France chiraquienne. Peu de gens connaissent les exploits de la dite Lucette, pas plus que nos beaux représentants de la France à l’étranger ne paraissaient gênés de frayer avec la représentante d’un des pires systèmes clientélistes mis en place par le RPR. Michaux-Chevry, pour mémoire, est à la tête d’un système |
Hier soir sur France 2, l’émission Complément d’enquête s’attaquait à la grande question caribéenne posée il y a peu, nous rappelait gentiment le bon Benoît Duquesne, par le groupe Accor. On allait donc parler tourisme, accueil, et tout ce qui ne va pas chez nos cousins antillais. Il aura donc bien sûr été fait mention d’Accor, pour mieux rebondir sur l’Union Générale des Travailleurs Guadeloupéens, qui avec leur incroyable manie de tout bloquer incarnent l’ensemble du problème.
On n’aura rien entendu sur les conditions de travail chez Accor, rien n’aura été dit des récents problèmes auxquels le groupe a eu à faire face dans ses Formule 1. Eh non. Parce que ce qui nous intéresse ici, ce sont les abus des syndicats antillais. A cause d’eux, on ne peut pas travailler tranquille. Et puis ces emmerdeurs rétrogrades, dès que les discussions tournent à leur désavantage, quand ils n’ont plus rien à dire, ils nous ressortent le coup de l’esclavage, nous dit Ary Encelade, vice-président du Medef local. Il le sait bien, il était indépendantiste. On ne la lui fait pas, hein. En Guadeloupe, si on ne peut rien changer, si il y a des problèmes à tous les niveaux, c’est parce que les Antillais n’ont pas su évoluer. Bon.
Suite à un sujet sur les abus de fonds publics où des anciens préfets nous laissent entendre que les magouilles de certains élus locaux ont été couverts par des gouvernements passés, notamment le gouvernement Chirac de 86, le bon Duquesne interviewe l’éternelle Michaux-Chevry(cf encadré), à qui il suffit d’un revers du droit pour effacer les timides évocations de ses problèmes avec la justice. " Mauvaise justice " qui l’a prise en faute nous dit-elle, et elle sait de quoi elle parle, elle est avocate. Oui bien sûr il y a des problèmes de fonds publics dans les Antilles. Il y a trop d’argent perfusé dans les DOMs depuis la métropole, cela entraîne des abus, d’ailleurs elle l’a toujours dit, elle a toujours été contre le RMI. Ca ne fait qu’encourager les abus, en effet. Benoît Duquesne acquiesce consciencieusement. OK.
L’exemple de réussite touristique de St Domingue vient éclairer plus avant les problèmes de nos Français d’outre-mer. Si les différences sociales y sont soulignées (le salaire moyen y est 5 fois inférieur au salaire moyen des îles françaises…), on sent bien comme un ton rêveur dans le commentaire, c’est vrai qu’elles sont jolies ces touristes dont les seins sursautent sur les terrains de beach volley, et elles illustrent tellement bien la réussite locale. On suit un vacancier meusien émerveillé devant les palaces locaux, et les entrepreneurs français qui commencent à s’installer sur l’île. C’est la " paix sociale " (sic) qui les attire, nous explique un responsable de Conforama. Quel bel euphémisme. On se prend à rêver d’un petit bungalow sous les cocotiers, on se prend à goûter cette belle paix sociale, à espérer que nos nègres en prennent de la graine…
Peine perdue. Non seulement ils n’aiment pas travailler, mais en plus ils ne font que se droguer, ces ingrats. La Martinique est ravagée par les affres du cannabis, à un tel point que les policiers n’arrêtent même plus les consommateurs, ils se contentent de détruire l’horrible substance quand ils mettent la main dessus. Le problème indéniable du crack est abordé de manière encore plus intéressante : les douaniers sont quasi impuissants, confrontés à des problèmes logistiques et à une tendance bien locale à la fainéantise, qui les fait abandonner les planques passé 22h, parce que c’est la fin du service. Pour enchaîner sur le sujet, Duquesne a cette fois décidé de faire appel à une spécialiste de la situation, Miss France 2003. Et puis rideau, sur fond de soleil couchant sur vagues et cocotiers.
Euh, France 2. Bien sûr, vous avez vaguement laissé la parole à l’un des membres fondateurs de l’UGTG, le temps pour lui d’évoquer l’impasse économique où a mené la monoculture. Mais bon franchement. Même Téléstar trouve votre documentaire limite. Ils vous enjoignent à "ne pas sombrer dans la caricature". J’ajouterais que sortir les doigts du cul et se mettre à un vrai travail d’enquête sera pas mal non plus, à moins que le titre de l’émission se rapporte à un vrai boulot antérieur et inconnu, dont ceci serait donc le complément. Ah mais oui, suis-je bête. Un complément visant donc à apporter la conclusion oubliée dans l’effort original, à savoir que bon les gars, faut arrêter quoi, l’esclavage c’est fini quand même. Eh ben merci France 2. Au moins on mourra moins cons.