Voilà. C’est là tout ce que l’on peut sûrement affirmer à propos d’un auteur qui verse dans la SF comme dans le polar, quand ce n’est pas bien au-delà. Inutile, donc, de chercher à cataloguer Champion Mojo Storyteller…
Pour preuve, jetez donc un œil à ce petit opus : Bob the dinosaur goes to Disneyland
Vous reconnaîtrez que les grands du roman noir ne nous ont pas habitués à ça. Et pourtant, le très respecté Mr Lansdale a largement trouvé sa place dans l’univers improbable du polar, avec entre autres, deux personnages récurrents : Hap Collins et Leonard Pine. Le premier est blanc, hétéro, tendance démocrates. L’autre est noir, homo… tendance, vous l’aurez deviné, républicains. Le décor est planté quelque part, dans le fin fond… du Texas.
Globalement, ces deux-là galèrent pas mal. Chaleur, poussière, jobs à la con. Les deux vieux potes sont régulièrement entraînés dans des histoires toutes plus glauques les unes que les autres, que l’on ne vous racontera pas ici. Ce serait gâcher le suspense… Mais ce que l’on peut vous dire, c’est que leurs conversations valent le détour, et que l’état des lieux qui nous est jeté en plein visage vaut son pesant d’or.
Il y a ces bleds qui n’accueillent toujours pas les noirs en centre ville… Aux alentours, dans quelques terrains merdeux et inondables, éventuellement. C’est que la guerre de sécession n’est pas finie pour tout le monde. Heureusement, et puisque la vie est belle, dans d’autres bleds, les blancs et les noirs se retrouvent… Dans des quartiers qui seraient presque convenables… Enfin… Si les autorités locales n’étaient pas gangrainées par quelques puissants enfoirés… Et, si elles voulaient bien faire leur boulot, en dégageant les vendeurs de came qui ont pignon sur rue… Elles permettraient à Leonard de ne plus s’adonner à l’un de ses rituels favoris : pousser des hurlements d’homme en colère et brûler les crack-house qui persistent à se reconstituer, là, en face de chez lui… C’est que, dans le meilleur des mondes, la came est revendue à des mômes, noirs pour l’essentiel…
Et puis, là-bas, sorti du racisme de base… normal, habituel, banalisé, qui survit à une vieille tradition de militantisme en cagoule blanches pointues, tout ça… Là-bas, on trouve aussi des pédophiles, qui enterrent des petits enfants sous les maisons… Des misogynes, qui boivent et qui mettent des grandes tartes à leur bonne femme… Des homophobes actifs, qui se tapent des petits pédés devant les caméras avant de leur péter toutes les dents… (Bon, ils font ça seulement parce que les films se vendent, hein… Sinon eux aussi ils préfèreraient
bosser à Disneyland)… Et puis, d’une manière générale, toutes sortes de gros cons, qui ont cette particularité, puisqu’on est en Amérique, d’être armés…
Voilà pour l’ambiance. Histoires et langages sans détours… Vie quotidienne ponctuée par quelques hamburgers graisseux, ou autres cookies à la vanille… Lecture de "cul et nichons"… Pour le reste, impossible de vous faire part du style d’écriture, de l’humour, de la force des descriptions et des dialogues, autrement qu’en clamant : Lisez Lansdale… Lisez Lansdale absolument… C’est immense.